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Nos ados et les jeux vidéo : mieux comprendre les ressorts de « l’envoûtement »

Aujourd’hui, les Tic ont apporté une nouvelle forme de divertissement : les jeux vidéo. A 8 ans déjà, parfois moins, les enfants expriment une passion folle pour ces jeux au point même d’oublier leurs cahiers et d’abandonner les cours. Ces nouvelles pratiques qui gagnent en proportion, suscitent émoi et inquiétude dans le rang des parents et éducateurs. L’excellence souhaitée et la socialisation des enfants prennent-elles un coup avec ce type de divertissement? Ces jeux initient-ils les jeunes apprenants à la violence ou contribuent-ils au processus d’enrichissement cognitif et culturel ? Quels stratagèmes, les parents doivent-ils mettre en place pour prévenir les dérives ? Voilà l’essentiel de l’analyse de cette semaine qui vous plonge dans le monde euphorisant des enfants ludiques !

9h 15 minutes, en plein jour ouvrable, cette salle de jeu du quartier populaire de Ouagou Niayes est pleine à craquer. Une quinzaine d’écoliers âgés de 8 à 15 ans et quelques élèves adolescents du secondaire y sont installés, les manettes en mains, affichant une si grande concentration qu’il leur est quasi impossible de remarquer une quelconque nouvelle entrée.

Avec leur puissance de calcul inédite, les consoles proposent un imaginaire, des graphismes, des scénarios comparables à ceux du cinéma. Sauf qu’ici le joueur est acteur. Le décor est ainsi planté de ce qui pourrait constituer aujourd’hui la première distraction des élèves de Dakar et environs.

S’ils se ruent tous les jours dans les salles de jeux vidéo, qu’est-ce qu’ils jouent concrètement comme jeux ?

Mother and Daughter Playing Video Games Presque tous les apprenants ont reconnu que le football (pro 13 et pro 14) est leur jeu préféré, viennent ensuite les jeux de course et de combat et au bas de l’échelle, les jeux d’aventure. De Candy Crush à World of Warcraft en passant par les Sim’s ou GTA V..., le jeu vidéo est pratiqué au moins une fois par semaine par 86 % des élèves interrogés, les garçons étant nettement plus nombreux que les filles. C’est presque autant que la proportion de « surfeurs » sur Internet pour le plaisir (près de 95 %). Le temps passé devant un écran « atteint parfois cinq à six heures quotidiennes, y compris en semaine », selon les différentes sources d’informations que nous avons recueillies. Les pratiques d’écrans étant souvent concomitantes (surfer, jouer, chatter sur les réseaux sociaux, envoyer des SMS…). La plupart des adolescents  dans les grandes villes jouent d’ailleurs aux jeux vidéo sur smartphone (74%), sur console (66%), sur ordinateur (55%).

« Utilisation excessive », « usage abusif », « addiction » : les termes varient pour désigner des pratiques jugées problématiques et leurs possibles effets sur la santé. C’est un réel motif d’inquiétude − et souvent un casse-tête − pour certains parents. Peu d’adultes voient les aspects positifs des jeux vidéo. Dommage car ils existent ! Du fait de la forte attractivité qu’ils exercent, ils donnent au jeune joueur l’opportunité de ne plus penser à ses problèmes pendant un moment (les doutes quant à son avenir, les conflits avec ses parents, ses peines de cœur, etc.), ils lui permettent d’alléger son quotidien.

Certains jeux d’action peuvent aussi servir d’exutoire à la violence : ils offrent un cadre virtuel où le joueur peut mettre en scène les pulsions agressives et destructrices présentes dans tout être humain. Ils apprennent à faire face à l’imprévu et entraînent à une extrême rapidité d’analyse et de décision.

Jouer c’est aussi explorer son identité.

Et puis quand l’adolescent joueur se construit un avatar pour le représenter dans le jeu, il doit se choisir un sexe, une apparence, décider des qualités et compétences qu’il souhaite lui attribuer : une excellente occasion de se pencher sur les différentes facettes de son identité, les lumineuses aussi bien que les ténébreuses, sans se sentir obligé d’en refouler certaines. C’est un formidable laboratoire identitaire. Enfin, en incarnant un héros à qui rien ne résiste, un ado très timide et inhibé peut gagner en estime de soi.

Besoin de surveillance et de sollicitude parentale

« La pratique excessive de jeu vidéo est souvent liée à un défaut de surveillance et de sollicitude parentale », nous disent les ados interrogés sur la question. Beaucoup évoquent le fait de « ne pas parler facilement à leurs parents ni trouver du réconfort auprès d’eux ». User de la meilleure stratégie revient à s’initier aux jeux honnis, car pour mieux sortir l’enfant du jeu, il est préférable d’y entrer avec lui. En s’intéressant à son univers, les parents auront nettement une représentation moins fantasmatique des jeux vidéo. Cette initiation leur permettra de poser les bases d’un dialogue critique et constructif.

Face à ces objets qui ont envahi le quotidien, le fait d’établir des règles (durée limitée autorisée, contrôle parental…) agit comme facteur de protection.

S’interdire d’interdire

L’interdiction est avant tout un puissant stimulateur de transgression que les enfants savent parfaitement utiliser. Interdits à la maison, les jeux seront consommés chez les amis, ou dans les cybercafés, et les contenus seront difficilement contrôlables.

Parler avec son ado de ce qu’il éprouve en jouant

Les jeux vidéo auront d’autant plus d’effets positifs que l’adolescent sera invité par ses parents à en parler. Pour l’inciter à mettre des mots sur ce qu’il vit, à nommer les émotions qu’il éprouve à travers ses jeux, à produire un discours cohérent et organisé sur cette activité. Outre le plaisir de se sentir écouté, cette narration l’aidera à garder de la distance par rapport à son écran. En effet, le langage permet toujours de ne pas en rester au stade des émotions brutes, non élaborées. Alors même face à un ado peu bavard, qui ne répond que par monosyllabes aux sollicitations de ses parents, ils ne doivent pas renoncer.

Fixer les règles réalistes

En d’autres termes, autoriser 30 minutes de jeux par semaine équivaut à une déclaration de guerre, il est donc plus judicieux d’établir un temps limite par jour (45 mn à 1 heure, selon l’âge), définir quels types de jeux sont permis, conditionner le bonus de temps de jeu à la performance scolaire, etc… constituent autant de « trucs et astuces » qui donnent un cadre structurant à l’utilisation des jeux vidéos.

Et pourquoi ne pas jouer avec lui ?

Jouer avec son enfant permet de mieux comprendre les ressorts de « l’envoutement » et représente un des meilleurs moyens pour se rapprocher de lui, et le cas échéant, prévenir les dérives.

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