En vue de permettre la légalisation de l’avortement en cas de viol ou d’inceste, l’Association des femmes médecins du Sénégal (Afems), en partenariat avec Population Council et l’Association des juristes sénégalais (Ajs), ont organisé un atelier pour présenter une étude sur l’expérience des femmes victimes d’un viol ou d’inceste. Elles ont aussi profité de l’occasion pour se pencher sur la problématique de la légalisation de l’avortement au Sénégal.
51 500 avortements répertoriés en 2012
En effet, au Sénégal, en 2010, 3,6% des décès maternels ont été liés à un avortement à risque. Tandis que 51 500 avortements sont répertoriés en 2012. Des résultats révélés par une étude présentée par l’Association des femmes médecins du Sénégal, lors de cet atelier.
Haoua Dia Thiam, députée à l’Assemblée nationale est d’ailleurs largement revenue sur le but de ce conclave. «C’est un atelier de restitution d’une étude qui porte sur le cas des femmes victimes de grossesses non désirées et aussi de la problématique de l’avortement médicalisé qui n’est toujours pas en vigueur au Sénégal et qui fait l’objet de beaucoup d’interrogations et d’inquiétudes», a-t-elle confié.
«Le Sénégal doit appliquer cette loi, étant donné d’abord que nous avons ratifié le protocole de Maputo où l’avortement en cas de viol ou d’inceste doit être pratiqué», a-t-elle martelé avant de souligner: «L’étude d’aujourd’hui a pu nous permettre de jauger l’importance de l’avortement clandestin, mais aussi du traumatisme que subissent ces femmes victimes de viol ou d’inceste. Le traumatisme est là et ça ne sert à rien de se cacher la face. Il faut prendre le taureau par les cornes».
3% des femmes en prison ont commis des infanticides
Toutefois, elle a précisé: «L’Assemblée nationale, en 2004, avait voté une loi sur la santé de la reproduction. Et il y a des dispositions qui pourraient être améliorées et cela nous permettrait d’être simplement en conformité avec les lois nationales».
Selon Mme Thiam, «sur le taux de femmes incarcérées, presque plus 3% ont commis des infanticides. Et elles ne l’ont pas fait par de gaieté de cœur».
Seynabou Ba, présidente de l’Afems, a quant à elle révélé :«Pour arriver au vote de la loi sur l’avortement médicalisé, on a la taskforce qui est un comité de plaidoyer pour que les femmes victimes de violences ou de viols puissent accéder à un avortement sécurisé, médicalisé, encadré où elles ne risquent pas leur vie».
«Le réseau Siggil djiguéne, l’Ajs et l’Afems ont pu travailler avec des femmes victimes de viols ou d’inceste qui vivent des problèmes de sociétés, de santé, soit à la suite d’un avortement, soit en ayant gardé l’enfant. Et d’autres femmes qui ont eu de réels troubles psychiatriques ou gynécologiques», a confié le Dr Ba
Avec plus de 50 000 avortements clandestins pratiqués chaque année au Sénégal, plusieurs associations sénégalaises relancent le débat sur l’IVG, qui n’est toujours pas autorisée.
L’Association des Femmes Médecins du Sénégal (AFEMS) a mis en place un plaidoyer pour « que les femmes victimes de violences ou de viols puissent accéder à un avortement sécurisé, médicalisé, encadré, où elles ne risquent pas leur vie », a expliqué Seynabou Bâ, présidente et médecin de l’association, dans le journal Le Populaire le 17 octobre. Une étude réalisée par l’association a prouvé que plus de 50 000 avortements clandestins ont été pratiqués en 2012 dans le pays. Des données qui révèlent aussi que 3.6% des décès maternels sont liés à des IVG à risque.
Cependant, les ONG islamiques voient la légalisation de l’IVG comme une négation du droit à la vie. Ce serait selon eux la « porte ouverte au vagabondage sexuel ». Cette levée de bouclier des ONG islamiques risquent de mettre un frein à ce plaidoyer à tout point de vue louable de l’association des femmes médecins. L’horreur du viol ou de l’inceste ne peut être véritablement appréhendée que par les femmes, car seule une femme peut comprendre la profonde détresse d’une femme violée ou victime d’inceste et qui est condamnée à se taire pour éviter un scandale familial.
Toutes les associations de femmes du Sénégal ou toute femme sénégalaise où qu’elle se trouve devraient appuyer cette initiative de toute leur force pour faire appliquer la loi de Maputo. C’est la moindre des choses pour se solidariser avec ces victimes qui peuvent être demain nos sœurs, nos filles ou nos petites filles. Debbosenegal est de tout cœur avec l’AFEMS.