Avant de faire un tour d’horizon de ce pays voisin et de sa magnifique culture, nous allons, en tant que magazine féminin, nous intéresser avant tout aux femmes. Dans cet article, nous lèverons un coin du voile de la mauresque, issue d’une des ethnies du pays, les maures.
Dans le calme plat de l’après-midi, un youyou (bruit que font les femmes arabes quand elles crient en tapotant leur bouche) s’élève venant de chez le voisin, puis un deuxième, et un troisième. Mon amie compte. Trois youyous : c’est un divorce ! Si cela avait été 7, ç’aurait été un mariage.
Je me désole de cette mauvaise nouvelle. Mon amie, une mauresque rencontrée en Europe, pendant que nos deux époux y servaient comme diplomates, se marre. Je ne comprends pas ce qu’il y a de drôle. Elle me l’explique : cette voisine vient de divorcer pour la 7ème fois ! Dès demain, la nouvelle aura fait le tour de la capitale et les hommes plus « fortunés » les uns que les autres vont commencer à défiler chez elle. Ça sera à celui qui renchérira le plus, pour avoir la chance de remporter le cœur de la belle pour la 8ème fois !
En effet, ici, plus la femme divorce, plus elle est courtisée, et donc elle prend de la valeur. Je n’en reviens pas. Comment un divorce peut-il s’avérer être une bonne nouvelle pour une femme ? Mon amie m’explique que dans leur culture quand une femme se marie, on commence le décompte. Elle-même dira : «ce n’est que mon premier époux ». S’il s’avère que ce mari est l’homme de son cœur, comme c’est le cas pour mon amie, elle peut rester mariée longtemps à cet homme, même pour la vie. Mais s’il se trouve que c’était un mariage arrangé, ou que, pour une raison ou une autre, le mari ne convient plus à la femme, elle demandera à être libérée avant de retrouver rapidement chaussure à son pied; pourvu qu’elle soit belle et charmante. Ses griottes auront fini de vanter ses charmes en un rien de temps et les hommes feront la file devant son domicile.
Musulmane, la femme n’a pas le droit de se remarier avant 3 mois pour s’assurer qu’elle ne porte pas l’enfant du divorcé. Cependant, cela ne l’empêchera pas de recevoir ses potentiels prétendants qui ne viendront « officiellement » que pour lui rendre visite, faire un brin de causette et donner l’argent du thé, mais tout en rivalisant de générosité pour retenir l’attention de madame. Les cadeaux vont s’amonceler et même des voyages avec devises à la clé seront proposés à la belle, qui en profitera au maximum et fera son choix en silence, avant la fin du « edde » (temps d’attente de 3 mois avant le remariage). Selon les préceptes de l’Islam, pendant ces 3 mois, ni la femme, ni les prétendants n’ont le droit d’exprimer à haute voix leurs sentiments, le divorce n’étant pas tout à fait consommé et l’ex pouvant se raviser à tout moment et revenir chercher sa femme.
Je dis à mon amie à quel point elles ont la chance de pouvoir faire marcher à ce point la gent masculine ! En effet, je me souviens d’un jour où, à l’étranger, elle était venue me rendre visite un dimanche après-midi. Vers 18h, elle appela son mari pour qu’il vienne la chercher. A son arrivée, son époux l’appela pour lui dire qu’il était en bas de l’immeuble. Elle acquiesça et reprit la conversation de plus belle ! Au bout de 20mn je lui dis: « ton mari t’a prévenue qu’il était là, non? » Elle me répond comme une fleur «mais oui ! Il est là. Et alors, il n’a qu’à attendre qu’on finisse de causer » « mais pourquoi l’as-tu appelé alors ? » «mais, pour qu’il soit là quand on aura fini de causer ! » Ebahie, j’ai mis fin à la conversation en la sermonnant: “ce n’est pas bien ce que tu fais ! » Elle se marre et une fois en bas, alors que je me confonds en excuses auprès de son mari ce dernier me dit tout simplement « mais non, ce n’est pas grave, j’écoutais les infos à la radio en attendant que vous ayez fini ! ».
Chez les maures, dans la tradition ce sont les hommes qui faisaient le marché pour leurs femmes. Bien sûr, de nos jours, dans les couples modernes les domestiques sont là pour tenir ce rôle mais avant, la femme mauresque ne devait avoir pour souci que de plaire à son mari et de procréer. Elle ne montrait ses atours qu’à lui, donc il n’était pas question, même voilée de la tête aux pieds, qu’elle aille faire les courses. C’est l’homme qui s’en chargeait.
Mon amie me rappelle également que quand la mauresque tombe enceinte, tous ses caprices lui sont passés par le mari. Principalement au moment de l’accouchement. Elle-même, en travail pendant qu’elle accouchait de son premier bébé, avait exigé que son homme lui rapporte le collier raz de cou en or d’une de ses cousines. Et l’époux s’était immédiatement exécuté avec l’accord de la cousine, avant de lui faire faire le même collier chez le bijoutier après l’accouchement.
Les préjugés ayant la vie dure nous avons toujours pensé que chez les maures, la femme est malheureuse. Condamnée au gavage pour plaire aux hommes, limitée dans son habillement par le voile, cloîtrée chez elle car déplaçant difficilement les kilos superflus, elle est femme objet, manipulée à merci par le mâle, mais détrompons nous ! A y regarder de plus près, la mauresque est une femme plutôt libre.
Les femmes mauresques modernes ne sont pas gavées, instruites, elles interviennent à tous les niveaux de l’état en tant que fonctionnaires. Selon leur niveau d’éducation, elles performent à tous les échelons dans le privé ou les institutions internationales, emmitouflées dans leur voile. C’est de grandes commerçantes qui voyagent dans le monde entier, qui brassent des milliards et tiennent une bonne partie de l’économie du pays entre leurs mains. Elles sont parfois artistes, chantent, dansent dans des tournées nationales ou internationales. Elles fument souvent sans que cela ne choque personne, car chez eux fumer, c’est culturel.
Leurs hommes qui suivent à la lettre les préceptes de l’Islam, qui recommandent d’aider et de plaire à son épouse si l’on veut atteindre la prospérité, y croient fortement et évitent au maximum de contrarier leurs épouses. Les femmes en profitent pour les mener à la baguette. Que demander de plus ? Femme peut-elle être plus heureuse que ça ?
Dans nos prochains articles, nous parlerons du sort des femmes dans d’autres ethnies d’Afrique de l’Ouest.