Au contraire du christianisme, l’islam ne considère pas le divorce comme la rupture d’un sacrement, pour la simple et bonne raison qu’il ne considère pas le mariage comme un sacrement, administré par un prêtre pour fondre deux âmes en une seule, mais plutôt comme un contrat conclu entre deux personnes consentantes.
Cependant, ce contrat, d’un type particulier, doit nécessairement avoir comme objectif, au moment de sa conclusion, de durer de façon indéfinie : c’est bien pourquoi le mariage temporaire ou mut’a est strictement interdit par l’islam. L’objectif de pérennité du mariage fait que le divorce n’est pas chose légère.
Si l’islam a malgré tout fait du divorce chose possible, c’est parce qu’il entend tenir compte de la nature humaine : il peut arriver que les deux personnes ayant fondé un foyer se révèlent, au bout de quelque temps de vie commune, incapables de continuer à vivre ensemble. La possibilité de divorcer alors est le moindre de deux maux. En effet, obliger deux personnes qui ne s’entendent absolument plus à rester ensemble serait les exposer à des maux graves, très graves ; graves au point de pouvoir conduire à des scènes de plus en plus violentes, voire même plus grave encore, de meurtres ou de suicides. Et leur permettre de ne plus vivre ensemble et de ne pas se remarier ailleurs serait les exposer à ne plus pouvoir connaître de vie conjugale et familiale (comme dans la religion chretienne).
Une parole est attribuée au Prophète (PSL) qui dit : « La chose permise la plus détestée de Dieu est le divorce » (rapporté par Abû Dâoûd). Certains spécialistes du Hadîth sont d’avis que la chaîne de transmission de ce Hadîth en fait un Hadîth faible (dha’îf). D’autres, cependant, disent que adh-Dhahabî a authentifié la chaîne d’un Hadîth quasi-identique rapporté par al-Hakim ; en tout état de cause, les différentes chaînes existantes pour ce Hadîth en font un Hadîth sinon authentique (sahîh), du moins bon (hassan) (voir Fatâwâ mu’âssira, tome 1 pp. 114-117). Même à retenir l’avis selon lequel ce Hadîth est faible, son contenu est de toute façon approuvé par d’autres Hadîths qui sont, eux, authentiques. En voici un : le Prophète (PSL) a dit : « Iblis établit son trône sur l’eau et envoie ses légions. Le démon qui a (ensuite) le plus de proximité avec lui est celui qui a réussi le plus grand trouble (fitna). L’un de ces démons vient à lui et dit : « J’ai fait ceci et cela. » Mais il lui répond : « Tu n’as rien fait. » Puis l’un d’entre eux vient à lui et lui dit : « Je n’ai pas lâché [tel humain], jusqu’à ce que j’aie réussi à provoquer la séparation entre lui et son épouse. » Iblis rapproche de lui ce démon et lui dit : « Quel bon fils tu es ! » (rapporté par Muslim, n° 2813, et autres). On voit ici que le divorce pour une cause qui n’est pas sérieuse réjouit Iblîs…
Shâh Waliyyullâh écrit : « Sache que le fait que le divorce se généralise et qu’il devienne chose à laquelle on accorde aucune importance recèle de nombreux maux. » Et de citer, parmi ces maux, le fait que des gens pourraient multiplier mariages et divorces, avec la secrète intention de pouvoir ainsi vivre, sous couvert de mariage, ce qui s’apparente en réalité à du libertinage. Et de citer un autre mal : la banalisation du divorce annihile chez les gens le développement des responsabilités familiales, des qualités d’entraide mutuelle et de patience face aux petites adversités de la vie de couple. En somme on privilégie alors la légèreté face à la conscience du devoir. « Malgré tout, poursuit-il, si l’islam n’a pas voulu interdire le divorce, c’est parce qu’il arrive qu’un couple ne puisse plus avoir de vie commune, les conflits étant devenus insupportables » (Hujjat ullâh il-bâligha, tome 2 pp. 367-368).
En somme, l’islam considère que le divorce est possible en soi et est juridiquement valable, mais que la mauvaise gestion de cette possibilité de divorcer – par exemple une trop grande légèreté dans son emploi – en fait quelque chose qui est mauvais sur le plan moral.
Le divorce est donc en islam quelque chose à éviter. Et pour l’éviter au maximum, il faut que chaque élément du couple sache se préserver de l’égoïsme et de l’individualisme et faire des concessions. Il faut que chacun ne donne pas trop d’importance aux petites querelles, qu’il pardonne, qu’il fasse plaisir à l’autre. C’est pour ne pas savoir passer sur des choses en réalité insignifiantes que trop de couples divorcent trop facilement. Les causes pour lesquelles on divorce doivent donc êtres sérieuses.
Prochain article : divorce et comité de réconciliation